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Blog-A-Idées
10 avril 2011

triple autoportrait

 

FICHE DE SYNTHESE : Triple autoportrait de Norman Rockwell.

 

INTRODUCTION : Norman Rockwell est un peintre américain né en 1894 et mort en 1978.

Extrêmement célèbre auxUSA, surtout dans les années 50 car il illustre la couverture du magazine Saturday Evening Post pendant des décennies, illustre le roman Tom Sawyer, fait des affiches de pubs … Il réalise des affiches qui illustrent le discours de Roosevelt en 1943 et dans les années 60 il se montre concerné par les problèmes politiques notamment la ségrégation contre les noirs (The problem we all live with). Sa peinture est caractérisée par un très grand réalisme, un souci du détail expressif : ses œuvres tardives sont influencées par la concurrence de la photo, au point qu'il est parfois difficile de les distinguer.

Trois mots résument son style : réalisme, humour, narration : ce sont souvent des illustrations qui semblent raconter des histoires, souvent avec tendresse comme dans Le fugitif (The runaway).

Comme la plupart des peintres, il réalise ici son autoportrait … à sa manière bien particulière ! Je vais donc commencer par décrire ce tableau puis étudier l'image qu'il donne de lui-même et enfin je verrai comment il modernise le pacte de sincérité de l'autoportrait.

 

  1. DESCRIPTION.

    - Huile sur toile de 1mètre sur 80 cms environ.

    - Le titre du tableau se comprend tout de suite : c'est le portrait d'un homme qui se peint de dos en train de se regarder dans la glace. C'est une mise en abîme, on ne sait plus bien lequel est le « vrai », il nous montre toutes ses facettes et non pas le choix délibéré de son meilleur profil.

    - La mise en abîme se poursuit sous forme d'esquisses, des croquis de recherche affichés sur la toile en train de se faire : le tableau commence à ressembler à un jeu de piste à travers les différentes représentations de lui-même !

    - Tous les éléments de l'atelier d'artiste, en bataille, les pinceaux et les tubes de peinture ouverts trainent partout, des reproductions d'artistes sont accrochées à la toile, un livre d'art est ouvert, un seau qui semble servir de poubelle ou de rangement : c'est un artiste au travail que l'on voit, revêtu de sa chemise de peintre ; on assiste à l'œuvre en train de se faire et non au résultat final, comme si on pénétrait dans le secret de la création …

  1. UNE DROLE D'IMAGE.

    - Certains éléments donnent une profondeur à son autoportrait en le mettant en perspective parmi d'autres symboles : ainsi, les reproductions affichées, sans doute comme des modèles sont celles de Van Gogh, Dürer, Picasso : de grands maitres dont les autoportraits sont extrêmement célèbres ! Elles donnent une certaine solennité, un gage de sérieux ; le miroir dans lequel il se regarde et dans lequel son image s'encadre donc est un beau miroir au cadre doré, surmonté d'un aigle qui tient le drapeau américain entre ses serres : on peut penser que le citoyen américain qui s'y reflète est grandi, ennobli par ce symbole ; de même, le casque doré juché sur le haut du chevalet semble renvoyer à des exploits glorieux et rappelle les peintures qui célébraient les actes guerriers héroïques. Bref, un cadre prestigieux pour cet autoportrait, placé sous la protection d'illustres et glorieux symboles.

    - Pourtant, le livre d'art posé sans précautions sur la vieille chaise dont la paille s'effiloche sert surtout de plateau pour un verre de coca (qui penche dangereusement) et un tube de peinture, de la fumée provenant sans doute d'une pipe mal éteinte monte de la poubelle, le peintre se représente avec des fesses imposantes, placées sur un coussin rouge comme un écrin, les pieds légèrement en dedans dans une attitude un peu ridicule, un vieux chiffon et un porte-feuille dans la poche arrière du pantalon, un nœud papillon un peu inutile autour du cou : il semble se caricaturer lui-même.

    - Le contraste entre les symboles et les détails réalistes crée donc un décalage humoristique, le spectateur est séduit par l'originalité de cet autoportrait qui ne cherche pas à flatter l'ego de son auteur !

  2. UNE HISTOIRE SANS PAROLES.

    - Mais le décalage ne s'arrête pas là : le peintre s'est représenté trois fois mais les trois images ne sont pas les mêmes ! On a l'impression alors de jouer au jeu des sept erreurs : entre l'image du miroir et celle sur la toile, la technique a changé : le peintre se peint en couleur en train de se peindre, mais le portrait sur la toile est en noir et n=blanc et ressemble d'ailleurs davantage à un dessin, même s'il se peint un pinceau à la main … sa pipe est normalement inclinée vers le bas, elle est vers le haut sur le tableau, il a légèrement modifié sa coiffure et surtout, il a perdu ses lunettes !

    - Sans ses lunettes, il est beaucoup plus jeune, ne semble plus avoir les yeux écarquillés comme un myope qui essaie d'y voir plus clair (au propre comme au figuré) mais les sourcils relevés dans une expression de surprise ou d'amusement : il semble cette fois se moquer un peu de la situation ; il y a donc un décalage très net, il ne se peint pas comme il est et comme nous le voyons dans la glace … et pour cause puisque ses lunettes sont opaques !

    - On peut donc se demander à quoi servent les lunettes et le miroir, puisqu'il ne se voit pas et ne se peint pas comme il est ! La réponse est sans doute simple : se moquer ! De lui sans doute, qui choisit de se rajeunir et de n'en faire qu'à sa tête, de nous peut-être aussi … en effet, à partir du moment où un peintre, connu de plus pour son très grand réalisme, choisit de faire son autoportrait, nous sommes forcément incités à le croire, nous croyons l'image qu'il nous donne ; il s'agit de la même chose pour une autobiographie : le lecteur croit naturellement ce que l'auteur lui confie, c'est la base du pacte autobiographique. Ici, il semble se moquer de cette convention, et le souligne avec le miroir qui ne le reflète que partiellement (son reflet n'est pas centré dedans) et ses lunettes qui ne voient rien : on retrouve alors les armes préférées du caricaturiste. A noter: la signature du tableau est sur le tableau en train de se faire, comme si c'était la seule version authentifiée, validée.

CONCLUSION.

Norman Rockwell apporte sa variation humoristique à la technique de l'autoportrait : il modernise l'exercice de style en jouant sur les faux-semblants et en prenant la liberté de ne pas se ressembler et de se moquer gentiment du spectateur, qui partage sa jubilation. C'est un autoportrait ludique, qui ne se prend pas au sérieux. En détournant ainsi les conventions, Rockwell est finalement convaincant dans son mensonge : il est inutile qu'il rajeunisse son image, car il semble évident que c'est une âme de gamin malicieux qu'il peint, et qui doit jubiler de faire ce bon tour sous les yeux austères des trois maîtres affichés dans un coin !

On peut donc finalement comprendre encore différemment le titre du tableau : triple pour l'image de nous que les autres voient, celle de nous-mêmes que nous ne parvenons pas à voir dans la glace, celle que nous ressentons de nous-mêmes … C'est sans doute lui qui s'approche ainsi le plus de la vérité et pose la question la plus importante de l'autobiographie : comment choisir ou concilier toutes les images de nous-mêmes ? C'est avec la technique du collage que j'ai essayé d'apporter ma réponse à cette passionnante question, si vous voulez jeter un coup d'œil admiratif … (recherches personnelles possibles : les 3 peintres du tableau, Luc Quinton et les collages).

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Commentaires
C
Salut ici un petit caribou des neiges qui aimerai s'évader les cervelle avec du bourrage de crane -L'HDA- de plus a cause des mes sabots je ne peut pas écrire au clavier voila !!!!!
E
Babouch
E
Babouch
E
Babouch
D
Vraiment bien fait merci beaucoup ça va m'aider pour l'histoire des arts...
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